La Rochelle Jacques Demy et Alain Bergala





La Rochelle

La Coursive
Jacques Demy : "La création Demy, parcours"

28 / 29 septembre 2013
un stage de 2 jours

 Samedi 28
 15h00
La Baie des anges  1962
 séance de travail > 19h00

20h30
Les Parapluies de Cherbourg  1964
suivie d'une rencontre publique avec Alain Bergala


 Dimanche 29
 9h30
Une chambre en ville  1982  
séance de travail > 13h00

15h00
Trois places pour le 26  1988
séance de travail > 18h00



Qu’est-ce qu’un grand cinéaste ? C’est quelqu’un qui trouve un équilibre unique, – qui n’existait pas avant lui – entre les grandes options de base qui sont les mêmes pour tous ceux qui font des films. La plupart des cinéastes acceptent sagement de faire un choix parmi ces options contradictoires et de renoncer à celles qu’ils n’ont pas choisies. Jacques Demy a aimé à égalité des cinémas dont les principes fondamentaux semblent difficilement compatibles. Bresson et Ophuls. Minnelli et Cocteau. Pagnol et Welles.

On parle volontiers de « l’univers de Jacques Demy », et l’une de ses grandes ambitions (réussie) a été de créer un monde que l’on retrouve avec émotion et nostalgie de film en film, avec ses villes portuaires, ses appartements aux étranges couleurs, ses mères essayant de guider la vie de leurs filles pour réparer la leur, ses amoureux malheureux ou désynchrones, ses malentendus et ses quiproquos, ses personnages qui passent d’un film à l’autre, et toujours les jeux de l’amour, du hasard et du destin social.

Mais cet univers ne doit pas nous masquer « le cinéma de Jacques Demy » comme geste de création d’une audace incroyable, d’une invention permanente. Un cinéma de l’entre-deux. Un entre-deux que personne avant lui n’avait exploré avec une telle audace tranquille : entre le réel et l’artifice, entre notre monde ordinaire et un monde qui n’existait que dans sa tête, entre le merveilleux et le trivial, entre le corps ordinaire et le corps chantant et dansant.

On suivra le parcours de la création-Demy de son premier long-métrage, quasiment bressonien, « La Baie des Anges » à son dernier film, « Trois places pour le 26 », où il rassemble tout ce qui a constitué les grands fils rouges de son œuvre : la vie et le spectacle, la fascination de l’inceste, la vérité et les masques, la pesanteur et la grâce, les déchirements et la légèreté. On y passera par la case « Parapluies de Cherbourg », le plus parfaitement demyien de ses films, et par l’œuvre qui a le plus grandi en trente ans, « Une chambre en ville », dont on peut aujourd’hui mesurer pleinement la grandeur et la terrible noirceur.

Un mystère traverse tous les films de Jacques Demy, l’enfance. On sait tout ce qui vient anecdotiquement de la sienne : les ports, les garages, le petit théâtre, etc. Mais comment, par quels chemins secrets, l’enfant que Demy a préservé en qui a-t-il résisté aux déceptions et à la lucidité de l’adulte devant la réalité de la vie ? C’est sans doute un moteur essentiel de sa création.
Alain Bergala

Photo : La Baie des anges &copy DR