1e rencontres du cinéma indépendant de La Roche-sur-Yon

.Une sélection de films inédits..Dans le cadre du FIF 85 à La Roche-sur-Yon (13 au 18 octobre 2011).

Ces films ont été choisis
par le Jury presse du FIF 85 / 2011 et l'ACOR
parmi des films proposés par le SDI



Composition du jury
Yves Aumont • Ouest-France
Catherine Bailhache • ACOR
Christophe Kantcheff • Politis
Eric Loret • Libération
Isabelle Régnier • Le Monde




Les quatre films sélectionnés par le jury sont programmés dans le cadre du FIF 85
entre le 15 et le 18 octobre 2011 et soutenus par l'ACOR



Samedi 15 octobre 2011 • 21H30
en présence de Mouloud Mimoum*
et du distributeur, Gérard Vaugeois

My land
de Nabil Ayouch
| Maroc | 2011 | 1H25 |
| avec Khadijeh Gharabli, Abou Afifi Abou Hassan |
| distribution : Les films de l'Atalante | sortie prévue : 4 ou 11 janvier 2012 |
* Mouloud Mimoun est journaliste, organisateur du Maghreb des films






Dimanche 16 octobre 2011 • 21H30
en présence de Raphaël Siboni,
d'HPG,d' Isabelle Régnier   
et de Thierry Lounas, distributeur

Il n'y a pas de rapport sexuel
de Raphaël Siboni
| France | 2011 | 1h18 |
| avec HPG, Cindy Dollar, Michael, Stracy, Phil Hollyday |
| distribution : Capricci films | sortie prévue : fin 2011/début 2012 ||







Lundi 17 octobre 2011 • 18H30
en présence de Sophie Clément, distributrice

Les Acacias
de Pablo Giorgelli
| Argentine / Espagne | 2011 | 1h25 |
| avec German de Sliva, Hebe Duarte |
| Caméra d'or Cannes 2011 | soutenu par l'ACID et l'AFCAE |
| distribution : Bodega films | sortie prévue : 4 janvier 2012 |







Mardi 18 octobre 2011 •  17H30
en présence du distributeur

The Day He Arrives
de Hong Sang-soo
| Corée du Sud | 2011 | 1h19 |
| avec Yu Junsang, Kim Bokyung, Kim Sangjoong, Song Sunmi |
| Un certain regard Cannes 2011 |
| distribution : Acacias | sortie prévue : mars 2012 |





Le principal objectif des Premières rencontres du cinéma indépendant est de faire découvrir des œuvres d’auteurs inédites, issues des lignes éditoriales des membres du SDI,qui ne bénéficient pas de la notoriété préalable des films art et essai médiatisés.

Dans le secteur cinématographique, contrairement à la règle industrielle habituelle, la fonction "recherche et développement" n’est pas assurée par les groupesdominants. Le renouvellement de l’offre de films (accompagnement de nouveaux cinéastes, découverte des cinématographies peu diffusées, réédition des œuvres du patrimoine cinématographique, …) repose exclusivement sur les distributeurs indépendants, qui font office de "têtes chercheuses".

Ils en avancent les « frais d’édition » (promotion et tirage des copies), assumant seuls les risques d’un éventuel échec.

Afin d’être reconnus etd’avoir une chance de déclencher le "bouche à oreille" favorable qui leur donnera accès à un nombre significatif d’écrans, ces films doivent pouvoir êtrevus par le maximum de programmateurs des salles, de journalistes et despectateurs cinéphiles. Les festivals à la ligne éditoriale exigeante, comme celui de La Roche sur Yon, sont des plates-formes idéales.


Vincent Paul Boncour et Etienne Ollagnier, présidents du SDI








Le cœur et les raisons…
un texte des critiques membres du jury

Après l’expérience plaisante et enrichissante du jury de la presse l’an dernier, le festival de la Roche-sur- Yon nous a sollicités pour sélectionner les films du Syndicat des distributeurs indépendants présentés lors de l’édition 2011. Demande inhabituelle pour un quatuor de critiques venus d’horizons différents. Fallait-il cesser d’exercer notre métier et composer une programmation ? Nous l’avons tenté d’abord. Notre sélection devait-elle être éclectique, consensuelle, représentative des films qui nous étaient soumis ? Cet essai a fait long feu : pour chacun de nous, seuls deux ou trois films comptaient réellement. Nous avons donc décidé d’affirmer un choix résolu, une sélection cohérente et stimulante. Notre désir de la proposer aux spectateurs en est d’autant plus vif. « Un choix résolu », cela signifie en premier lieu l’adhésion la plus large au sein de notre petit collectif, et justifiée par des arguments forts. Ainsi, sur les douze films qui ont été donnés à voir, nous en avons retenu quatre : My Land de Nabil Ayouch, les Acacias de Pablo Giorgelli, The Day He Arrives de Hong Sang-soo et Il n’y a pas de rapport sexuel de Raphaël Siboni, les deux derniers l’ayant été à l’unanimité. Certes, nous ne pouvons revendiquer de révéler quatre œuvres inédites : les films de Hong Sang-soo sont régulièrement sélectionnés à Cannes, et les Acacias y a obtenu cette année la Caméra d’or (prix réservé à un premier film, toutes sections confondues). Mais nous n’avions aucune raison d’écarter ces films, bien au contraire, dès lors que nos choix ont été avant tout guidés par l’idée que nous nous faisons de l’exigence cinématographique, comme d’une ouverture, d’une surprise à partager.



Surpris, nous l’avons été par Il n’y a pas de rapport sexuel , de Raphaël Siboni, un film qui frappe autant par ce qu’il montre que par le geste qui en est à l’origine. Plus connu dans le milieu de l’art contemporain où son nom est toujours associé à celui d’un autre artiste, Fabien Giraud, Siboni change ici de partenaire mais reste fidèle à l’éthique collaborative qui est au cœur de son travail. Ce documentaire est un pur film de montage, conçu à partir d’images froidement filmées pendant dix ans sur les plateaux des tournages X de HPG. Sans porter aucun jugement, Il n’y a pas de rapport sexuel ouvre des abîmes de questionnements : sur la sexualité, la solitude moderne, les mystères du désir et du plaisir, la domination et l’aliénation.


Mettre à mal les certitudes et les modes de représentation du spectateur, se donner comme un miroir grossissant, très déstabilisant, du monde tel qu’il va, c’est aussi le travail de My Land, documentaire du cinéaste franco-marocain Nabil Ayouch sur le conflit israélo-palestinien. Contrairement à d’autres, Ayouch ne défend pas une cause, ni n’entonne l’air consensuel de la réconciliation à tout prix. Il s’inscrit plutôt dans le prolongement d’une démarche personnelle, celle d’un homme parvenu à dépasser une position strictement passionnelle vis-à-vis d’Israël et des injustices commises envers le peuple palestinien, en un désir de voir sur place, de se confronter à la situation dans toutes ses nuances. My Land est fondé sur une belle idée de cinéma, qui a consisté à filmer les témoignages de vieux Palestiniens réfugiés au Liban depuis qu’ils ont été chassés de leurs terres par l’armée sioniste en 1948, et de les faire entendre à de jeunes Israéliens qui vivent aujourd’hui sur ces mêmes terres, dont la plupart sont dans le déni des circonstances tragiques qui ont présidé à la création de leur pays. Ces images agissent sur eux comme un retour du refoulé. L’intensité de leurs réactions atteste d’un malaise diffus autant que de leur attachement indéfectible au lieu où leur vie se déploie. My Land concentre toute la complexité politique et psychologique de ce conflit, qui ne peut pourtant rester sans solution. Ce n’est pas la moindre de ses qualités.




Aucune politique ou sociologie visible au contraire chez le Coréen Hong Sang-soo. Dans The Day He Arrives , la musique est connue. C’est une ritournelle qu’on revisite avec le même plaisir, depuis dix ans qu’on le fréquente. On boit, on s’engueule, un cinéaste raté rencontre des femmes, des étudiants, le temps d’un séjour à Séoul. Les tables se suivent et se ressemblent, on dit ce qu’on ne pense pas, on ne fera pas ce qu’on dit, on ne sait plus ce qu’on pense. The Day He Arrives est une petite forme, un film de poche, en noir et blanc, et Séoul ressemble à Venise sous la neige. Economie des plans, éloge de l’amour court, puisqu’on ne drague ici que dans le but de se quitter ensuite pour toujours. Avec ce film bref, jamais on n’avait aussi bien aperçu que, chez Hong Sang-soo, c’est l’existence elle-même, infiniment passive et éternelle, qui regarde les personnages.




Autre existentiel, l’Argentin Pablo Giorgelli déroule un scénario minimaliste, linéaire, silencieux ou presque, en inscrivant 1.500 kilomètres de plus dans une cinématographie nationale aimantée par l’axe routier nordsud où circulent déjà de nombreuses figures solitaires, telles Bombón el Perro de Carlos Sorin. Ici, un camionneur mutique, une femme paraguayenne avec enfant en cabine, passagers inopportuns. Route, exil intérieur, pudeur, brève rencontre… Pas besoin d’aller plus loin pour imaginer ce qui est en jeu, ce qui se noue. En cela, les Acacias est sans doute le film le plus sage de cette sélection. Chacun y tient sa place, sans ostentation. Sans bouger, les personnages se rapprochent. Confinée dans la cabine, la caméra se pose : champ / contre-champ, plans fixes sur l’une, l’autre, l’enfant. Derrière la vitre du camion, le ruban du paysage défile dans la poussière qui danse. Et le spectateur, brinquebalé dans la touffeur diesel des changements de régime, embarque à leur bord, se laisse gagner par la monotonie infusée par le maté. Comme si, bien avant le générique, il était du voyage. Comme s’il savait que la trajectoire de ces deux-là devait se poursuivre de toute éternité. Faire la route avec d’autres, le cinéma est aussi là pour ça.


Yves Aumont • Ouest-France
Christophe Kantcheff • Politis
Eric Loret • Libération
Isabelle Régnier • Le Monde